L'histoire
de Patrick, joueur:
J'avais
21 ans quand jai mis les pieds au casino pour la première
fois, avec des copains. Jai joué 100 francs à
la roulette et jai doublé mes gains. Par la suite,
jai souvent repensé à cet épisode,
je crois que si javais perdu ce jour-là, ma vie
aurait pu être différente.
Puis
jai démarré une carrière dassureur
et jai découvert les fins de mois difficiles.
Pour maider, mon père ma remis 100'000
francs, à titre davance sur héritage.
Cette somme aurait dû me permettre de voir venir confortablement.
Au lieu de cela, jai pris 3000 francs et je suis parti
au casino. Ca été pour moi le début de
lengrenage. Jai perdu plusieurs milliers de francs
et je me suis dit que cétait vraiment trop bête,
que je navais pas eu de chance et que jallais
me refaire.
En
quelques mois, les 100'000 francs de mon père y sont
passés. Malheureusement, plusieurs banques ont accepté
de me faire crédit, ce qui na fait quaggraver
mes dettes. Je me disais que jallais men sortir
et je me suis fait interdire dans les casinos.
Mais
je me suis laissé entraîner à aller boire
des pots, et cest là que jai commencé
à jouer au baggamon et aux cartes. Jai très
vite replongé. Javais des dettes partout, je
signais des chèques en blanc. En 1986, mon père
décide de me faire mettre sous curatelle. Même
comme ça, jarrivais à me débrouiller
pour trouver de largent pour jouer.
Puis
les machines à sous sont apparues, dès 1988.
A cette époque-là, jen étais arrivé
à voler mes propres clients en encaissant directement
le montant de leurs primes dassurance. A tous, sauf
à ma femme, je racontais que javais une maîtresse,
afin de justifier mes dépenses. Je navais plus
le moindre scrupule à faire des dettes, ni à
salir le nom de ma famille. Ce quil y a de terrible,
cest que même après toutes ces années,
je continuais à aller jouer en étant persuadé
que jallais gagner.
Jai
commencé à être suivi par un psychiatre,
que je roulais dans la farine comme les autres. Ce nest
quen 1995 quon a commencé à évoquer
le nom de maladie. Au début de cette année,
jai été licencié, je suis parti
du domicile conjugal à la demande de ma femme et ça
a été le début dune prise de conscience.
A presque 50 ans, je me retrouve dans un studio de 10m2.
Je
considère que le jeu a détruit ma vie, celle
de ma femme et de mes enfants. Jai pensé plusieurs
fois au suicide et je me dis quil aurait été
préférable que je me retrouve en prison, au
moins, je naurais plus pu continuer à jouer »
*
Ce témoignage a été publié dans
un article du GHI du 30.11.2000
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